Nous n’allons pas ici vous parler bagatelle, ou tendances en odeur de sainteté. Nous n’allons pas minauder, affrioler et vous chanter la bouche en coeur que les diamants sont les meilleurs amis de… qui, déjà ? Nous n’allons pas, non plus, flatter pour le plaisir, et placer des cajoleries là où il faut des chapeaux bas. Nous allons bien, pourtant, vous parler pierres précieuses et métaux rares, quintessence pleine de grâce et nectar de joaillerie. De celle, incorruptible, qu’aucune mode ne parvient à soumettre. De celle qui se nourrit d’Histoire et d’histoires, de mythes et de serments, de voyages et de rêves.
Peu de belles aventures naissent dans une cave, si ce n’est celle d’un fromage, d’un vin de garde, ou, éventuellement, d’un champignon de Paris. C’est pourtant bien là que celle-ci a commencé, avec le happy end qu’on lui connaît maintenant : dans une cave ouverte plein sud en marge des canons du métier. Pas une cave d’ermitage en vue de trouver un quelconque Dieu, ou une philosophie nouvelle dans le retrait du monde, plutôt un lieu d’expérimentation, d’apprentissage, de création et de parcours initiatique. Un parcours d’autodidacte, sans formatage ni carcan, inspiré par une passion qui ne souffre aucune limite, pour l’architecture, les sciences, l’astronomie, les voyages, la diversité des cultures…
Ainsi donc, la maison Tournaire est née dans une cave, en toute discrétion, sans que personne ne la voie venir, à pas feutrés et attendant son heure. Son créateur, Philippe Tournaire, qui nous raconte ici son histoire singulière, du petit village de Baffie à Montbrison, dévoile les arcanes d’une griffe qui se démarque, entre originalité suréminente et purisme racé. Son fils Mathieu, qui l’a rejoint dans sa quête artistique, n’a pas reçu que ses yeux, ou l’amour, en héritage. Ca aurait été, pourtant, déjà pas mal, et certains s’en seraient contentés. Il s’inscrit ainsi depuis 2008 dans ce qu’il aime appeler « une continuité différente », conscient que la création de bijoux coule dans ses veines en empruntant parfois d’autres chemins de passion.
Entre harmonie, symbolique universelle, architecture millénaire, savoir-faire incomparable et transmissions intemporelles, voici l’histoire en marche, et dans toute sa splendeur, de joailliers hors du commun, qui brisent les codes sans fausse note et réussissent l’alchimie du passé, du présent, et du futur.
« Celui-là, c’est un futur bijoutier »
C’est ce que l’arrière grand-mère de Philippe disait lorsque, petit, il démontait puis remontait réveils et pendules. Il a toujours fabriqué des bijoux, sans jamais penser cependant qu’il pouvait en faire un métier. Asthmatique, il est envoyé en internat dans les montagnes de Briançon pour 5 longues années, mais garde de cette période un souvenir émerveillé. Il y découvre la solidarité, les heures riches passées à la bibliothèque ou au ciné-club, et un tableau de Paul Klee, « Château et Soleil », fait de formes géométriques couvertes de couleurs et de lumières intenses. Il le contemple souvent et y puisera plus tard de l’inspiration. Les sciences et l’histoire l’attirent, comme la culture en général, grâce à des parents modestes mais cultivés et des profs souhaitant « relever le niveau de l’humanité ». De retour près de Saint-Germain-Laval, il suit un temps les traces de son père en passant un CAP radio-électronique. Et puis, soudain, tout part à vélo… Voilà qu’il commence, en 1973, installé dans la cave de ses parents à Baffie, à détourner des fourchettes ou des pièces en argent, pour en faire des bijoux uniques. Le bracelet « Free » de sa collection actuelle évolue depuis 40 ans mais reste emblématique de ses débuts de créateur désargenté. Avec un statut de « sculpteur sur métaux précieux », il y peaufine son art pendant 11 ans et se constitue une clientèle confidentielle. Ses créations sont inspirées de « ce qu’on voit dans la vie », de ses voyages et de la culture qui en découle. Mais une vitrine lui manque et c’est ainsi qu’il s’installe en 1984 rue Tupinerie à Montbrison. Assez vite, de marginal il devient reconnu, et, d’année en année, son équipe, qu’il forme lui-même, s’étoffe. Naissent alors les collections phares « Alchimie » et « Architecture », ou des classiques hors-tendances devenus indémodables. Une boutique Tournaire ouvre à Lyon en 1999, une autre place Vendôme à Paris en 2004. La joaillerie de caractère, téméraire et passionnée, qui place le cercle, symbole d’histoire, au centre de la création, n’en finit pas de naître. C’est en 2013 que la Maison Tournaire investit les locaux spacieux de Savigneux, où l’atelier est désormais ouvert sur la boutique.
De père en fils, l’or au bout des doigts
Mathieu a bien sûr passé une grande partie de son enfance dans l’atelier de son père. Il étudie à Milan l’histoire et l’anthropologie avant de commencer dans l’enseignement sa vie professionnelle. Mais, rattrapé par des mains d’or, il demande timidement à son père, en 2007, s’il peut le rejoindre. Pour Philippe, c’est une « divine surprise ». En 2008, Mathieu obtient son diplôme de gemmologie puis passe plusieurs années à se former à différentes techniques pour gagner sa légitimité. Il se met, progressivement, à la création, et devient directeur artistique de la Maison Tournaire en 2013, avant d’en reprendre la direction générale en 2017. Il explore d’autres pistes créatives en s’appuyant sur ses propres passions. Les engrenages, par exemple, marquent cette « continuité différente ». Ils sont pour lui les symboles du temps qui passe et une métaphore des rouages familiaux, de ceux qui nous rendent plus forts. La collection « Lock & Love », inspirée du pont des Arts, signe elle une sorte de ralliement interculturel, et une déclaration d’amour universelle. Mathieu s’attache également, dans un souci de diversification, à développer ses talents dans d’autres domaines connexes, comme la décoration d’intérieur ou l’art de la table présentés sous le nom de « Tournaire Déco ». Comme Philippe avant lui, Mathieu réalise des partenariats permettant de réunir deux marques pour créer un produit d’exception, comme ce fut le cas pour l’iconique stylo Bic/bijoux.
Savoir-faire et qualité
Formes et couleurs hors du commun, matériaux nobles, pierres précieuses, diamants non impliqués dans le financement des conflits armés, créativité affective et savoir-faire séculaires alliés aux prouesses de la modernité… Voilà ce qui caractérise la Maison Tournaire, et son équipe de 30 personnes, dont certaines dédiées à la recherche et développement, que ce soit pour le sur-mesure, la transformation, ou les séries de haute voltige. Après croquis, chaque pièce est créée sur des logiciels spécifiques. Après plusieurs heures de travail, une imprimante 3D la matérialise en cire. Celle-ci est retravaillée dans le détail de l’infiniment petit, avant d’être fondue dans un moule dans lequel sera coulé le métal choisi. La pièce ressort « brute de fonte » et passe alors entre les mains de divers savoir-faire : emerisage, montage, sélection des pierres, sertissage, polissage de finition… La précision est chirurgicale et les gestes solennels, pour veiller à la naissance d’un bijou audacieux, noble, et chargé de sens. Comme cette bague Alchimie qui reprend la trilogie carré-triangle-rond, emblème de la Maison Tournaire. Tout un symbole de vie et à d’évolution de l’être, qui passe du carré rigide au rond sage et harmonieux. Toute une histoire encore, qui fonde celles, nombreuses, à venir.
2, rue des Métiers, 42600 Savigneux – MONTBRISON
Tél. : 04 77 96 08 84
4 Rue Childebert – 69002 LYON
Tél. : 04 78 85 68 32
7 Cour Vendôme – 75001 PARIS
Tél. : 01 40 20 00 19